Il faut en finir avec la grossophobie. Cela passe par le fait de nommer et dénoncer cette réalité, mais aussi en changeant le regard sur les personnes qui en sont victimes...C'est bien souvent le cas pour beaucoup de discriminations...
Quand la Grossophobie entrait dans le dictionnaire en 2019...
Le terme de grossophobie ne figurait pas dans les dictionnaires usuels et a fait son entrée dans le Robert seulement en 2019. C'était une victoire, car cette introduction permet de "mettre le sujet sur la table".
Quelle définition ? Il s'agit d'une « attitude de stigmatisation, de discrimination envers les personnes obèses ou en surpoids ».
La mairie de Paris avait d'ailleurs organisé dès 2017 dans le cadre de la semaine de lutte contre les discriminations, une journée contre la grossophobie, signe que les prises de conscience sur ce thème se développent.
La Grossophobie est une forme de discrimination
Dans une étude pour le Défenseur des droits *, il ressort que l’apparence physique, qu’elle soit vestimentaire ou corporelle, occupe une place importante parmi les caractéristiques perçues comme un inconvénient pour être embauché. Pour les 33% de chômeurs qui déclarent avoir été discriminés à l’embauche, l’apparence physique est le deuxième critère cité (29% par les femmes et 20% par les hommes). Le fait d’être obèse est cité à 79% par les femmes et 73% par les hommes. Les femmes obèses rapportent 8 fois plus souvent que les femmes d’IMC « normal » avoir été discriminées à cause de leur apparence physique. Les hommes obèses le déclarent trois fois plus que les hommes d’IMC « normal ». Corrélativement, le fait d’avoir un physique attractif est vu comme un avantage par 66% des femmes et 65% des hommes.
Les normes d’attractivité physique et de corpulence admises en France, valorisant la minceur pour les
femmes, semblent donc s’étendre jusqu’aux conditions du recrutement.
Rappelons que le critère de l’apparence physique fait partie des motifs de discrimination introduits par la loi du 16 novembre 2001 au même titre que d’autres tels que l’âge, l'origine ou l’orientation sexuelle. La discrimination au travail constitue un délit puni d'une peine de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. La victime peut également saisir le Conseil de Prud'hommes, afin de solliciter l'annulation de l'acte discriminatoire (sanction, licenciement,...) et demander des dommages et intérêts en raison du préjudice subi.
Changer le regard sur les gros
Je vous recommande sur ce thème un excellent documentaire : Ma vie en gros diffusé sur France 2, de la militante féministe et anti-grossophobie, Daria Marx. Elle y raconte son combat contre les discriminations à l'égard des gros. Militante féministe et cofondatrice du Collectif Gras Politique ,elle avait déjà écrit le livre "Gros n’est pas un gros mot : chroniques d’une discrimination ordinaire" (Flammarion, Librio) en 2018.
Dans ce nouveau documentaire, elle donne la parole à cinq autres gros, comme elle. Et pas question de se cacher derrière des périphrases : «Je suis grosse pour de vrai. Ni ronde, ni voluptueuse, ni pulpeuse. Juste grosse».Après des années de souffrance, cette militante a décidé d’accepter sa condition et revendique aujourd’hui «le droit d'exister», sans être jugée ni moquée.
Malheureusement, les personnes grosses sont trop souvent victimes de nombreuses exclusions. Gabrielle Deydier, fondatrice du webzine culturel « Ginette le mag » et auteure d’« On ne naît pas grosse » (Éditions de la Goutte d’Or) expliquait dans une interview pour Public Sénat que l'on peut distinguer plusieurs types de grossophobie : « la grossophobie du quotidien », la grossophobie systémique « liée à la discrimination à l’embauche ou à des problèmes pour se soigner parce qu’on est trop gros ». La grossophobie du quotidien se traduit par "des actes de monsieur et madame-tout-le-monde qui se permettent de faire des réflexions à une personne obèse sur ses achats de nourriture au supermarché, sur ses choix de plats au restaurant, quand ce n’est pas de lui jeter des insultes à la figure." Les obèses rencontrent également des difficultés d'accessibilité pour se mouvoir et occuper l’espace de la ville peu adapté.
Autre difficulté, comme nous pouvons le rencontrer pour d'autres personnes victimes de discrimination : les stéréotypes. En effet, il faut combattre l’idée comme quoi "les obèses se laisseraient aller et n’auraient pas de volonté face à la nourriture."
Merci à toutes ces actrices et acteurs engagés de dénoncer ces formes de discrimination, de faire évoluer nos représentations et de contribuer ainsi au bien-vivre ensemble. Et cela n'est pas un gros mot.