C’est ce qui ressort du 15e baromètre « La perception des discriminations dans l’emploi » *, publié en décembre 2022 par Défenseur des droits
En effet, parmi les 10 critères de discrimination perçue dans la société française, c’est celui de l’origine et de la couleur de peau qui arrive en tête (53%). Viennent ensuite le critère de l’identité de genre avec un taux très élevé (50%), l’apparence physique (49%), les difficulté à s’exprimer en Français (45%), le handicap (45%), la nationalité (42%), l’orientation sexuelle (41%), la religion (38%), le fait d’être une femme (34%) et la précarité économique (29%).
C’est également le critère de l’origine et de la couleur de peau qui ressort en premier parmi les personnes déclarant avoir été témoins d’une discrimination ou d’un harcèlement discriminatoire au travail (33%, suivi de l’apparence physique : 32%).
Les personnes déclarant avoir fait l’objet d’une discrimination ou d’un harcèlement discriminatoire dans l’emploi, citent d’abord le contexte du travail au quotidien (32%), le choix des horaires de travail (27%), l’accès à l'emploi, le recrutement, les concours (25%) et le nombre d'heures hebdomadaires (24%).
Le nombre de personnes déclarant avoir fait l’objet d’une agression sexuelle dans l’emploi est particulièrement alarmant. En effet, au cours de leur vie professionnelle, un tiers déclare avoir déjà été l’objet des remarques gênantes sur la tenue ou le physique. Plus d’1 personne sur 5 dit avoir reçu des propos, écrits ou images à caractère sexuel (22%). 18% déclarent avoir fait l’objet de contacts physiques légers imposés et 12% d’attouchements (seins, fesses, sexe, haut des cuisses). Dans la même proportion, 12% ont subi des pressions pour obtenir un acte de nature sexuelle et 9% ont subi un rapport sexuel ou un acte de nature sexuelle forcé.
Quelles sont les principales conséquences des discriminations sur la vie professionnelle des victimes de discrimination ou de harcèlement discriminatoire ? Dans seulement 9% des cas, des sanction sont prises contre l’auteur des faits et malheureusement, des mesure de protection n’ont concernées que 17% des victimes. Dans bien des cas, les dommages sont élevés pour ces victimes : démission ou négociation d'un licenciement (16%), réorientation professionnelle (16%), dégradation des conditions de travail (15%), demande de changement de service (12%), et même un avertissement ou un blâme (9%), des sanctions ou mesures de représailles (7%) et un licenciement ou le non-renouvellement du contrat (7%).
Lorsque les salariés sont victimes de discrimination ou de harcèlement discriminatoire au travail, ils sont désarmés et sont seulement un quart à en parler à la direction ou à un encadrant, 17% à un médecin ou à la médecine du travail. Seulement 14% des victimes alertent les représentants du personnel ou les syndicats. Une victime sur cinq n’en a rien dit et 28% en parlent à un proche, 26% à un collègue. L’approche contentieuse demeure marginale : 13% contactent l’inspection du travail, 9% déclenchent une procédure contentieuse, 6% prennent conseil auprès d'un avocat ou d’une association, 6% contactent le Défenseur des droits.
Deux ans et demi, après le mouvement Black Lives Matter (relancé après la mort de George Floyd en mai 2020), dont le retentissement était d'une ampleur mondiale, devant les résultants inquiétants du 15e baromètre du Défenseur des droits et qui confirment nos perceptions sur le terrain, les employeurs doivent se mobiliser plus encore dans leur politique diversité et inclusion et notamment sur le critère de l'origine. Les dispositifs d'alerte devraient être renforcés et tous les acteurs doivent jouer leur rôle, grâce notamment à un accompagnement et une formation des managers de proximité et une mobilisation des partenaires sociaux. Les salariés en tant que collègues doivent devenir de véritables alliés des victimes et gagneraient à être davantage sensibilisés, car ils sont parmi les premiers à êtres informées.
* L’enquête conduite par l’institut Ipsos, en juin 2022 portait sur un panel de 1 000 actifs représentatifs de l’ensemble de la population active française.