Dans un communiqué du 25 avril 2024, dans le cadre d’une plainte à l’encontre d’une société qui collectait de nombreuses données personnelles de candidats à l’embauche, la CNIL rappelle que le recruteur ne peut collecter que les données présentant « un lien direct et nécessaire avec l’emploi proposé ou avec l’évaluation des aptitudes professionnelles » (Article L. 1221-6 du Code du travail).
Les exigences du principe de minimisation lors du recrutement d’un salarié
La CNIL avait été saisie d’une plainte à l’encontre d’une société qui collectait de nombreuses données personnelles de candidats à l’embauche, telles que le lieu de naissance, la nationalité, la situation de famille, (s’ils étaient en couple, les nom et prénom de leur conjoint, leur date et lieu de naissance, leur profession, le nombre d’enfants et leur âge), ainsi que l’ensemble des salaires perçus dans les entreprises précédentes (salaire brut annuel global dont variable).
Or, cette collecte est contraire au principe de minimisation qui impose au responsable de traitement de traiter des informations limitées à ce qui est nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis. Les entreprises doivent se conformer à cette exigence du principe de minimisation lors du recrutement d’un salarié. La société s’étant conformée à cette mise en demeure, la présidente de la CNIL a clôturé la procédure de mise en demeure à son encontre.
La présidente de la CNIL a clairement explicité, dans ce contexte à la société que, dans le cadre d’un recrutement, les informations qu’il n’est pas justifié de collecter auprès d’un candidat à un emploi :
- Des informations relatives aux membres de sa famille ;
- Du lieu de naissance du candidat;
- D’informations relatives à la nationalité d’un candidat pour évaluer sa capacité à occuper l’emploi proposé. Un niveau de détail agrégé (par exemple sous forme de trois options : « Français », « ressortissant de l’Union européenne » ou « hors UE ») devrait suffire, notamment pour les emplois dits « de souveraineté ». Dans le cas des candidats de nationalité étrangère, les informations relatives à la possession d’un titre les autorisant à travailler en France font partie des données susceptibles d’être collectées dans le cadre du recrutement ;
- Du montant des salaires perçus par le passé d’un candidat, à l’initiative d’un recruteur. Cette information ne présente pas d’utilité pour apprécier la capacité à occuper l’emploi proposé ou les aptitudes du candidat, et ne sont de ce fait pas compatibles avec les dispositions du code du travail. Le candidat peut cependant, de sa propre initiative, fournir tout élément utile à la justification de ses prétentions salariales.
En recrutement, le seul objectif des informations demandées : valider ou non une candidature...
Par ailleurs, la CNIL rappelle que le recruteur ne doit procéder à aucune discrimination illicite des candidats. Par exemple, une personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement en raison de son âge ou encore de sa situation de famille (Article L. 1132-1 du Code du travail). Les informations demandées doivent permettre d’identifier le candidat le plus adapté au poste à pourvoir, de vérifier ses compétences (les connaissances, le savoir-faire et le savoir-être) et les qualifications requises pour le poste concerné (diplômes, titres et expériences). Elles doivent avoir pour seul objectif de pouvoir valider ou non une candidature.
Certaines informations ne peuvent être collectées qu’au stade de l’embauche (et non à l'étape du process de recrutement)
Ce n’est qu’au stade de l’embauche, c’est-à-dire une fois qu’une candidature a été définitivement retenue, que l’employeur pourra collecter des données supplémentaires (état civil complet, comprenant notamment la date et le lieu de naissance, l’adresse postale, le numéro de sécurité sociale, les copies des justificatifs, etc.). En effet, seules les données des candidats retenus sont nécessaires pour l’accomplissement des formalités obligatoires de l’employeur (déclaration préalable à l’embauche, déclaration sociale nominative, etc.).
Ces éléments ne sont pas nouveaux, mais il est toujours utile de les rappeler...Et pour aller plus loin, je vous recommande le guide du recrutement de la CNIL, publié en janvier 2023 et bien sûr le règlement général sur la protection des données - RGPD (notamment l'article 5 - Principes relatifs au traitement des données à caractère personnel).
Dix-huit ans après la création de l'association A Compétence Egale, dont je suis l'un des fondateurs et que j'ai eu l'honneur de présider durant cinq années, je me souviens des débats que nous avions sur tous ces thèmes, notamment lors de la rédaction du Guide "Comment recruter sans discriminer", avec Stéphanie Lecerf et avec la Halde (aujourd'hui Le Défenseur des droits). En 2024, un recruteur ne peut plus ignorer ces exigences...